2018 a déjà une semaine : Ainsi va l'Afrique...
On a bouclé la première semaine de 2018, sans qu'un événement particulier majeur ne vienne défrayer la chronique, égayer ou assombrir davantage paysage politique en Afrique.
"Pas de nouvelles, bonnes nouvelles", serait-on tentés de reprendre, sauf que le continent est toujours gangrené à des degrés différents, par le terrorisme, la corruption, la pauvreté, la mauvaise gouvernance... Aussi est-il des pays qui méritent qu'on s'y arrête et des signes préludant que "quelque chose" va arriver sur lesquels il serait intéressant de se pencher.
Un petit round up dans quelques régions du continent.
Tunisie : Un futur indécis
Tout le monde était prévenu depuis des mois : 2018 va être une année difficile. Hausse des prix de nombreux produits et services qui a donné l'accolade au Nouvel An, grogne dans différents secteurs et catégories sociales, dont les toujours en augmentation haut diplômés chômeurs, mobilisation de l'opposition et un Gouvernement qui doit faire des miracles pour contenir la situation, trouver des solutions à la multitude des dossiers qu'il a sous la main, sauter l'écueil des négociations sociales d'avril, mener à bon port les municipales de mai qui risquent de transfigurer la scène politique et préparer 2019, l'année des législatives et de la présidentielle.
Après une semaine, à peine, de l'entrée en vigueur de la loi de finances 2018, les protestations ont commencé à gagner plusieurs régions du pays, faisant un mort, déjà, lundi à Tebourba, petite ville à une trentaine de kilomètres de Tunis vers l'ouest.
Youssef Chahed, le chef du Gouvernement, a beau pouvoir compter sur des soutiens aux reins solides, ces derniers risquent de se lasser s'il ne réussit pas quelques prouesses dans d'autres domaines que le sécuritaire où il a déjà obtenu un satisfecit.
Maroc : En TGV
Une belle réalisation qui, de surcroît, constitue une première en Afrique, est ce TGV (train à grande vitesse), dont on a testé avec succès, le 22 décembre dernier, les performances où il a atteint les 320 kilomètres/heure. En attendant sa mise en exploitation en juin prochain, les essais vont continuer. L'infrastructure, la signalisation, le raccordement des gares, leur équipement, la mise à niveau du personnel...vont être peaufinés.
Comme première étape, le TGV reliera en deux voies, Casablanca à Tanger, avant de s'étendre à d'autres axes. Un beau projet qui profite à l'économie, dont le tourisme rehausse le prestige du Royaume et apporte un sentiment de fierté aux Marocains. Cela reléguera par ailleurs, ne serait-ce que pour un moment, au second plan des problèmes récurrents telles l'épine qui a pour nom le Polisario, la longévité de la tension avec le voisin algérien, la corruption, les crises gouvernementales...
Oublié tout cela. Au Maroc, on montera tous en TGV.
Afrique du Sud : Zuma sur le départ
C'était dans l'air; cela s'est confirmé dimanche lorsque le Parlement a annoncé qu'il allait se pencher, les 10 et 11 du mois courant, sur la révision des règles de la destitution du président de la République.
Une procédure qui va toucher Jacob Zuma. Il suit ainsi les injonctions de la Cour constitutionnelle allant dans ce sens, suite au scandale de la rénovation, avec des deniers publics, de sa propriété privée. Si la procédure aboutit et elle a de fortes chances d'aboutir, il connaîtra le même sort que son prédécesseur, Thabo Mbeki, dont il a été l'artisan de l'éviction.
La popularité en lambeaux, l'image entachée par des affaires de corruption, décrié par l'opposition et même par une partie de son propre parti (ANC) qui vient d'élire Cyril Ramaphosa comme président, Zuma, malgré des soutiens fidèles, est tout près d'une sortie peu glorieuse et n'ira probablement pas jusqu'au bout de son deuxième mandat qui prend fin en 2019.
On chuchote depuis qu'il a commencé à être poussé vers la démission, qu'il s'accroche parce qu'il veut négocier des assurances qui lui garantiraient une immunité ou un minimum de casse, alors que le nouvel homme fort de l'ANC, le parti de Mandela, veut en finir avec le "cas" Zuma qui nuit à l'image de sa formation, appelée à une rude bataille pour maintenir sa domination sur la scène politique.
Une domination qui est en train de s'éroder et qui risque de ne plus être dès les prochains scrutins.
Ouganda : Musevini à vie
Ce n'est pas le cas de Yoweri Musevini qui, désormais, peut rester constitutionnellement président de la République ougandaise à vie.
En poste depuis 1986, il avait déjà fait voter en 2005 un premier amendement supprimant la limitation de l'exercice présidentiel à deux mandats consécutifs. Cela lui a permis de briguer et de gagner un troisième, un quatrième puis un cinquième mandats.
Se sachant en limite d'âge et ne pouvant aspirer à un sixième mandat en 2021, il a fait passer le 26 décembre dernier, au cours d'une séance houleuse ou l'hémicycle s'est transformé en arène avec injures, chaises volantes et bagarres, un nouvel amendement stipulant l'annulation pure et simple de l'article limitant à 75 ans l'âge maximum du candidat à la présidence.
La voie lui fut ainsi balisée pour devenir à vie, s'il le veut, le président de l'Ouganda. L'opposition qui s'est élevée contre cette décision du Parlement, dominé par le MRN (Mouvement de résistance nationale) le parti de Musevini, ne compte pas en rester là. Une partie, au moins, de l'opinion publique non plus.
Libéria : Les chantiers de Weah
La troisième aura été la bonne. Georges Weah, la super star du football mondial, a enfin été élu président du Libéria. Un merveilleux cadeau de fin d'année auquel il tenait, non pas comme un jouet prisé, mais plutôt comme un vœux de servir son pays auquel il a toujours été attaché et envers lequel il s'est constamment montré généreux et ce bien avant qu'il ne s'investisse dans la politique. Ainsi disait-il.
Il n'est certes pas facile de succéder à une Prix Nobel (Ellen Johnson Sirleaf) quand on a consacré sa jeunesse au sport -ce qui lui était et lui est reproché-, mais il paraît qu'il a beaucoup appris et qu'il a bien défini son champs d'action et ses priorités.
Rénover l'infrastructure, moderniser l'agriculture en visant non seulement l'autosuffisance mais l'exportation également, généraliser l'éducation, garantir la santé et lutter contre la corruption constituent pour lui des urgences, selon ses premières déclarations de président de la République.
Il n'a pas caché que pour ce faire, il comptait sur les partenaires du Libéria qu'il veut amener à augmenter leurs apports, en installant les conditions qui favorisent cette option.
Bonne chance la star.
Nigéria : Boko Haram sévit encore
Abubakar Shekau, le chef de l'une des deux factions de Boko Haram qui sévit au nord du Nigéria est, accessoirement, à l’intérieur des frontières des pays riverains du Lac Tchad (Niger, Cameroun et Tchad), a inauguré la nouvelle année par une vidéo où il revendiquait le dernier attentat suicide de Gamboru dans l'état du Borno qui a fait près de 20 morts (bilan toujours provisoire) ainsi que les récents raids sur des villages et des postes de contrôle de l'armée.
Malgré la propagande recherchée et l'atrocité de ces méfaits qui viennent s'ajouter à une longue série dont les 25 bûcherons d'une même localité égorgés vifs, Shekau a paru fébrile et les images de la vidéo peu convaincantes quant aux réelles capacités de Boko Haram à mener de grandes offensives déstabilisantes.
En effet, l'impression qui se dégage de cette vidéo est celle de combattants presque en haillons, manquant de véhicules et d’armement conséquents.
Boko Haram sévit encore certes, mais l'essoufflement semble être là et bien là.