Télévision: Les Tunisiens conquis par les séries turques
Grâce aux séries turques, le téléspectateur tunisien rêve de belles histoires d’amour qui le font sortir de son quotidien, déclare à Anadolu un critique, soulignant que ces feuilletons ont encouragé beaucoup de ses concitoyens à visiter la Turquie.
Les séries turques sont parvenues à conquérir les télévisions tunisiennes, et à accaparer l’attention des téléspectateurs, en une dizaine d’années.
Les chaînes tunisiennes sont entrées en concurrence dans la diffusion des séries turques, vu que les familles tunisiennes y prêtent un grand intérêt et les suivent épisode par épisode.
En 2008, les séries turques avaient commencé à capter l’attention des Tunisiens, lorsque la chaîne tunisienne « Hannibal » (privée) avait diffusé le premier feuilleton turc « Nur », dont les héros étaient Kıvanç Tatlıtuğ et Songül Öden.
Dès lors, une grande partie des Tunisiens avait commencé à suivre les feuilletons turcs, comme « Ihlamurlar Altinda » (Les années perdues), « Aşk-ı Memnu » (L’amour interdit), « Kara Para Aşk » (L’amour noir) et des dizaines d’autres.
Etant donné ce grand succès réalisé par les séries turques, la chaîne tunisienne « Nessma » (privée) a opté pour le doublage en dialecte tunisien de plusieurs feuilletons, dont « Kaderimin Yazıldığı Gün » (Le jeu du destin), intitulé « Les graines de grenade », après le doublage.
La même chaîne diffuse également, après avoir réalisé le doublage, « La chatte de cendre », « Je suis ton fils Papa », « L’amour qui m’a brûlé » et d’autres séries.
Pour sa part, la chaîne « Hannibal » diffuse actuellement la partie 9 de la série « Kurtlar Vadisi » (La vallée des loups) ainsi que « Diriliş Ertuğrul » (Résurrection d’Ertugrul).
La série « Kiralık Aşk » (Un amour à louer) est diffusée sur la chaîne privée « Attessia ».
***Les séries les plus regardées
La plupart des instituts de sondage d’opinion en Tunisie indique que les séries turques sont les plus regardées par les Tunisiens.
« Sigma Conseil », l’institut de sondage le plus important dans le pays, a estimé en novembre dernier, que le feuilleton « L’amour qui m’a brûlé » a enregistré le plus haut niveau d’audience, soit 18,9%.
Le feuilleton « Vent dans l’éolienne » vient en deuxième place avec 14,2%, suivi par « La chatte de cendre » avec 11,4%. Le feuilleton « Résurrection d’Ertugrul » vient à la 7ème place avec 7,3% d’audience.
***Texte, images et techniques
Kamel al-Chihaoui, spécialiste en critique télévisuelle, a expliqué l’intérêt que portent les Tunisiens pour les séries turques par la qualité des textes, l’esthétique de l’image et les techniques de haut niveau.
Dans une déclaration à Anadolu, al-Chihaoui a considéré que ces feuilletons ont mis en relief de grandes ressemblances entre la société turque et les sociétés arabo-musulmanes.
Et de poursuivre qu’ « il existe de grands liens intellectuels, culturels et politiques entre les Arabes et les Turcs, depuis l’ère de l’Empire Ottoman (1299-1923) ».
Il a assuré, dans le même ordre d’idées, que ces liens ont engendré une sorte de relation spirituelle entre le téléspectateur tunisien et les séries turques, qui lui rappelle ces liens.
Al-Chihaoui a précisé, dans ce contexte, que le feuilleton « Muhteşem Yüzyıl » (Harem du Sultan) a réalisé un grand succès lors de sa diffusion sur la chaîne « Nessma ».
Il a expliqué ce succès par le fait que ce feuilleton a pu satisfaire le narcissisme de la femme, qui détenait le pouvoir grâce à ses propres outils, intelligence et ruse, contrairement à l’image répandue sur la femme esclave privée de sa volonté.
« Ce feuilleton a satisfait l’égo de la femme, vu que les femmes, notamment celles au foyer, représentent la catégorie la plus accro à ce genre de séries », a-t-il ajouté.
Selon al-Chihaoui, grâce aux séries turques, le téléspectateur tunisien rêve de belles histoires d’amour utopiques, qui le font sortir de son quotidien.
Il a ajouté que ces séries ont également encouragé beaucoup de Tunisiens à visiter la Turquie et ses endroits connus.
D’autre part, le spécialiste a indiqué que la conquête des cœurs des Tunisiens par les séries turques se poursuivrait si ces dernières sont capables de renouveler leurs sujets et leurs formes, car le téléspectateur tunisien cherche la nouveauté.
**** Une faible production arabe
Le réalisateur et critique Tayeb Shili, défend le même point de vue qu’al-Chihaoui. Il a confirmé que les séries turques attirent les Tunisiens grâce à l’esthétique de l’image ainsi que les personnages, les beaux endroits et les techniques utilisées.
Shili a considéré, dans une déclaration à Anadolu, que cette attirance est la preuve d’une faiblesse de la production tunisienne et arabe en général.
Il a ajouté que la Tunisie ne soutient pas et n’encourage pas les réalisateurs et les scénaristes, appelant à prêter plus d’attention à ce secteur.
Et Shili de poursuivre que « les séries turques ont comblé le vide, en parallèle à l’émergence d’émissions banales de divertissement sur les chaînes tunisiennes ».
« Ces émissions ont été boycottées par un grand nombre de Tunisiens, qui ont recouru aux feuilletons turcs », a-t-il souligné.
****Suspense, comédie et romantisme
Cyrine, une téléspectatrice tunisienne, a indiqué qu’elle est fascinée par les feuilletons turcs, dont principalement « Le vent dans l’éolienne » et « L’amour qui m’a brûlé », grâce au suspense et leur côté romantique mélangé à la comédie.
Elle a indiqué à Anadolu qu’elle passe beaucoup de temps à suivre ces feuilletons qu’elle qualifie « d’extraordinaires ».
De son côté, Wiem (étudiante) a déclaré à Anadolu, que les feuilletons turcs la plongent dans une ambiance romantique et des histoires d’amour fictives, qui lui permettent d’oublier le quotidien.
Wiem a choisi de suivre les feuilletons turcs après leur doublage en dialecte tunisien. Elle considère que « L’amour qui m’a brûlé » est son préféré.
Marwa, fonctionnaire, a souligné qu’elle est devenue accro aux séries turques depuis la diffusion de « Muhteşem Yüzyıl » (Harem du Sultan) et de « Kurtlar Vadisi » (La vallée des loups).
Elle a précisé qu’elle préfère les feuilletons turcs car ils traitent des problèmes sociaux de la réalité, contrairement aux feuilletons indiens, basés en majorité sur l’imaginaire.
Quant à Sami, propriétaire d’un café, il a indiqué qu’il suit la plupart des feuilletons turcs, vu qu’ils sont proches des traditions tunisiennes.
Il a exprimé sa fascination pour ces feuilletons et a ajouté « je tends à regarder ces séries car elles traitent des mêmes problèmes que ceux vécus par les Tunisiens ».
Sami a précisé, dans ce contexte, que des relations culturelles et historiques unissent la Turquie et la Tunisie.
Ces séries sont comme un refuge qui le sépare du monde environnant et des conflits politiques, a-t-il relevé.
Dans le même ordre d’idées, il a ajouté que les séries turques l’ont encouragé à voyager en Turquie et à découvrir les endroits où elles sont réalisées.