Côte d’Ivoire: Opposition et pouvoir divisés sur la composition de la commission électorale
En Côte d'Ivoire, les élections municipales, régionales et sénatoriales se tiendront courant 2018. En attendant leur organisation, opposition, société civile et pouvoir ne semblent pas regarder dans la même direction.
Les uns estimant que la composition actuelle de l’institution ne garantit pas un scrutin équitable, crédible et transparent, tandis que le gouvernement, malgré les critiques, ne semble point courber l’échine.
Militant pour une réforme de l'actuelle Commission électorale, le principal opposant Pascal Affi Nguessan, à la tête d'une coalition de 17 partis, demande une nouvelle commission électorale indépendante (CEI) reposant sur trois piliers.
"Il faut une nouvelle CEI pour les élections locales prochaines. Une CEI équilibrée, reposant sur trois pieds équilibrés : la coalition au pouvoir, l'opposition et la société civile", a-t-il indiqué face à la presse.
Cette coalition doit, souligne t-il, être présidée par "une personnalité nationale reconnue pour son intégrité, sa compétence et son expérience administrative et sociale, personnalité choisie de manière consensuelle".
Pour Aboudramane Sangaré, qui dirige l'aile dure du Front populaire ivoirien, cette personnalité doit être autre que l'actuel président Youssouf Bakayoko.
"Quand on est l’homme par qui le scandale arrive (la crise post-électorale 2010-2011 ndlr), il faut s’effacer. Le bourreau ne peut se conduire avec l’épandage de l’innocent. Celui qui a fraudé aux élections ne peut pas être président d’une commission électorale indépendante", a-t-il critiqué, face aux médias jeudi.
"Nous voulons un président choisi de façon consensuelle. Un président qui remplit les critères d’honnêteté, d’intégrité, de connaissance du processus électoral et de gestion des hommes", a-t-il martelé.
Ces vagues d'appel à une révision de la composition de la CEI ont commencé depuis décembre 2016, suite à un arrêté émis par la Cour africaine des droits de l'homme, mais resté jusqu'ici sans effet.
"Nous sommes membres de cette Cour et nous avons ratifié le traité sur cette Cour et nous sommes obligés de respecter ses décisions pour quelques élections que ce soit", soutient Affi Nguessan.
"Nous sommes déterminés à aller jusqu’au bout. Et si le gouvernement persiste dans l’illégalité, nous serons obligés de tenter un passage en force", soutient le professeur Hyacinthe Nogbou, président du Congrès des jeunes patriotes (COJEP).
Au sein de la société civile, les voix se font aussi entendre.
Les organisations de la société civile regroupées au sein du Groupe de plaidoyer et d’actions pour une transparence électorale (GPATE) et du Réseau des acteurs ivoiriens des droits humains (RAID) ont élaboré, dans ce sens, une proposition de modifications du cadre juridique des élections.
Parmi les propositions faites, elles réclament un rôle plus accru ainsi que le retrait des représentants des entités étatiques, un mandat de six ans renouvelables une seule fois pour le président de la CEI avec une rotation au tiers pour les membres chaque quatre ans, le retrait des religieux et des chefs traditionnels.
Réaction du gouvernement
Pour confirmer son opposition à toute idée qui acterait la dissolution de la CEI, le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly a fait savoir le 14 février dernier, face à la presse que la CEI, bien que controversée, organisera les prochaines élections.
"La CEI actuelle est issue d’un consensus politique. Tous les partis politiques de Côte d’Ivoire ont été consultés. Et c’est consensuellement que la CEI actuelle a été mise en place, avec tous les partis politiques. Sachez que la CEI est le fruit d’un consensus politique entre tous les acteurs politiques", a-t-il indiqué.
Toujours d'après lui, pour arriver à l’actuelle CEI, le gouvernement a dû "faire des amendements pour créer des postes de vice-présidents afin d’avoir un consensus plus complet".
Les prochaines élections municipales, régionales et sénatoriales concerneront 197 communes et 31 régions du pays.