Colombie: Les ex-guérilleros prêtent serment au Congrès
- La route des Farc au Congrès a pourtant été semée d'embûches
Du 20 juillet 2018 au 20 juillet 2026, les ex-guérilleros Farc auront 10 sièges au Congrès colombien pour la première fois depuis la création du mouvement de guérilla en 1964.
Un accord de paix avec le gouvernement colombien signé en 2016 a accordé aux rebelles une représentation législative et a mis fin à leur lutte pour le pouvoir.
On pensait que c'était le dernier chapitre d'un demi-siècle de guerre civile largement reconnu comme le conflit le plus long de l'hémisphère occidental. Mais la route des Farc vers le Congrès n'a pas été facile.
Elle a du faire face à la colère populaire généralisée et à une farouche opposition de la part du centre-droit et de la droite du spectre politique. Les politiciens de droite ont constamment critiqué la décision d'accorder des sièges aux Farc. Pour eux, les Farc ont perpétré des crimes de guerre et ne devraient pas être en mesure de participer à la politique sans être d'abord poursuivis en justice.
L'accord de paix a donné aux membres des Farc l'amnistie pour les crimes commis avant la signature de l'accord. Les condamnations antérieures ont été prononcées par des tribunaux qui ont permis aux dirigeants du groupe de participer à la vie politique et de se porter candidats à des postes dans le fonction publique une fois qu'ils ont remis leurs armes. Cependant, toute violation ou infraction commise après l'accord sera poursuivie dans le cadre du système judiciaire ordinaire.
Les ex-guérilleros ont toutefois fait face à des défis judiciaires depuis la signature de l'accord. Le département de la Justice des États-Unis a demandé l'extradition d'un dirigeant des Farc, Zeuxis Pausias Hernández, alias Jesus Santrich, pour trafic de drogue, ce qui signifie qu'il ne pourra pas occuper son poste au Congrès. Santrich n'a pas été extradé. Il est actuellement en détention en Colombie et n'a pas été autorisé à prendre possession de son siège à la Chambre des représentants.
La détention de Santrich le 9 avril 2018 a déclenché une tempête politique. Ivan Marquez, un autre dirigeant important des Farc, a, par conséquent, abandonné son siège, arguant que le gouvernement avait violé l'accord
- Représentation accordée
La représentation des Farc dans la vie politique colombienne a été au centre des discussions de paix qui ont eu lieu à La Havane, la capitale cubaine. En conséquence, le groupe a obtenu 10 sièges au Congrès: cinq au Sénat et cinq à la Chambre des représentants. Les rebelles devaient devenir un parti politique.
En 2017, après la signature de l'accord de paix, les guérilleros ont formé un parti politique tout en conservant leur fameux acronyme: Farc. Cependant, ils ont enlevé l'élément "armé" du nom, le changeant des "Forces armées révolutionnaires de Colombie" à la "Force Alternative révolutionnaire de la Colombie" - une décision que certains estiment comme une erreur politique, car elle n'a pas dissocié le nouveau parti de son violent passé de guérilla.
Depuis qu'il a gardé son ancien nom, le groupe des Farc a tenté de se repositionner comme un parti politique axé sur la lutte contre la corruption avec un programme de réformes sociales plutôt que comme un parti révolutionnaire.
Un groupe de ses membres éminents a été présenté pour être élu au Congrès. L'ancien chef de la guérilla, Rodrigo Londoño, AKA Timochenko, a été élu candidat à la présidence.
Même avec leurs sièges garantis au Congrès, les membres des Farc ont décidé de participer aux élections législatives pour prouver leur popularité. Le 11 mars 2018, ils ont subi un coup dur après avoir remporté moins de 1% des voix. Londoño a également retiré sa candidature présidentielle après avoir souffert de problèmes de santé.
- Opposition politique féroce
L'accord de paix de La Havane a créé un système de justice transitionnelle pour enquêter et poursuivre les crimes de guerre commis pendant le conflit et pour rendre des sentences alternatives aux guérillas et aux militaires qui se sont présentés au nouveau tribunal de ce système.
Mais la mise en œuvre du processus de justice transitionnelle a été un cauchemar législatif et bureaucratique. Le Congrès ne l'a pas mis en œuvre dans les délais requis pour qu'il devienne fonctionnel avant la nouvelle législature. En conséquence, les membres des Farc choisis pour occuper les sièges du Congrès n'ont pas pu assister au tribunal.
L'opposition de droite estime que les membres des Farc ne devraient pas être en mesure d'atteindre le Congrès avant les poursuites judiciaires. Elle a à cet effet saisi la Cour constitutionnelle pour dénoncer la loi qui accordait les sièges aux anciennes guérillas. La Cour n'a pas encore annoncé sa décision.